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lundi 15 juin 2015

Hiérarchie sociale, Classe sociale et l’idée d’une nation mauritanienne

Publié le 14 juin 2015, 21:46

La hiérarchie sociale est la distinction sociale. Elle repose la pureté sociale. La société hiérarchisée se distingue par les castes. La caste est, selon Max Weber, un stand fermé (groupe de statut fermé) dans la mesure où elle impose des obligations professionnelles, religieuses et sociales extrêmement contraignantes. 



Le statut de chaque individu est déterminé à la naissance en Mauritanie. Nous naissons noble, guerrier, marabout, esclave, griot, etc.  La question généralement soulevée dans ce pays est l’esclavagisme. Il existe d’autres cas que nous en parlons rarement (griots, artisans). Tous ses groupes sont endogamiques et héréditaires. Le partenaire est choisi selon la classe sociale que l’on appartient. Aucune communauté mauritanienne n’échappe à cette situation. Ces normes et valeurs sociales sont la réalité mauritanienne. La société civile et l’Etat continuent de nier l’existence.

La société soninké pour masquer, cette réalité joue sur autre carte qu’on appelle dans le dialecte soninké « LADA LEMAKHOU ». Le « LADA LEMAKHOU » est une sorte de service. Il se déroule entre les castes dites inférieures et les castes dites supérieures. Ce système est pour masquer la vérité et apaiser les tensions à fin de maintenir une certaine stabilité sociale. Le « LADA LEMAKHOU »  consiste à la réalisation des tâches chez les soninkés entre ancien esclave et maître dans le cas des figures suivantes : mariage, décès, arrivé d’un étranger, etc. Si l’un d’entre eux (maître ou ancien esclave) se trouve dans l’une de cas, l’autre vient se charger des tâches (cuisine, vaisselle, etc.). Un système qui est aussi pratiqué d’une manière injuste. Les anciens maîtres ont compris avoir perdu certains privilèges et établissent ce système pour maintenir un certain ordre social et masquer la vérité. Les groupes communautaires s’organisent autour de la division sociale du travail. Au-delà de la religion musulmane qui est la religion de tout le citoyen mauritanien à 99 %, la chanson, l’imamat, l’utilisation du tamtam etc. dépendent de la classe sociale.

Les sociétés des classes sont  basées sur les critères de fortune. La Mauritanie n’échappe pas aussi à ce cas de figure. L’étude sur les classes sociales est la plus compliquée. La chance de réussite en Mauritanie dépend d’appartenir à un groupe communautaire particulier (les beïdanes). Les beïdanes sont un groupe communautaire composé des berbères et des arabes. Cela n’explique pas non plus que tous les beïdanes sont dans le bien-être.  Les guerriers et les marabouts, le sommet de la hiérarchie sociale maure, sont les plus favorisées. L’exemple type qui explique cette situation est la présidence de la Mauritanie. Le premier président mauritanien est issu de la tribu de marabouts, les deux suivants sont issus de guerriers, le quatrième et cinquième, sixième, septième et huitième sont aussi issus de marabouts et guerriers. Les vingt et un militaires qui ont tenté de renverser le régime en 2003 sont issus de tribus guerriers et maraboutiques. Tout ceci peut s’expliquer. Pour renverser un pouvoir, il faut le moyen financier, matériel et humain.

Il existe deux types de domination en Mauritanie. La domination traditionnelle qu’on trouve au sein de chaque communauté et la domination moderne. Dans chaque communauté, il y’a des dominés et dominants. J’appelle « domination moderne » le moyen financier et matériel aux mains des beïdanes. Les beïdanes imposent leurs lois, normes et valeurs sur toutes les autres communautés. Ils dominent tout le monde. Les dominés se dominent entre eux aussi. Une situation complexe a analysé. Il existe aussi des groupes beïdanes qui n’échappent pas à cette domination des beïdanes selon leur statut social.

Cette analyse brève de la situation montre que l’idée d’une nation mauritanienne est loin d’être atteinte. Le problème majeur réside dans le fait que la société mauritanienne n’est pas organisée de façon à permettre le transfert dans modèle basé sur une solidarité organique (Durkheim), c'est-à-dire la complémentarité des individus et des positions sociales. Il en résulte ce qu’à connu la Mauritanie depuis un certain temps c'est-à-dire l’absence d’un Etat-Nation un temps que tel et le retrait sur la petite société (Tocqueville). En effet, comme le rappelait E. Renan dans sa conception subjective ou élective de la nation développée dans une conférence en 1882 intitulée « Qu’est-ce qu’une nation ? » ; il n’est pas certain que les critères objectifs de la nation suffisent à comprendre l’existence d’une nation. Pour lui, cela n’est pas suffisant ni même nécessaire. Une nation c’est d’abord un vouloir vivre ensemble chez les individus qui composent la nation : « l’existence d’une nation est un plébiscite de tous les jours ». Cette affirmation permet de mieux comprendre le cas mauritanien. Le philosophe défendait l’idée de nation en 1882, en pensant notamment à l’Alsace et à la Moselle annexées par l’Allemagne en 1871 , terres où  les populations parlaient un dialecte proche de l’Allemand mais où la majorité aurait souhaitée rester français plutôt que de devenir allemand, ce qui ne parait pas si éloigné de la situation mauritanienne forçant un certain nombre de tribus à vivre ensemble mais surtout à se soumettre à un vivre ensemble forcé, sous le contrôle d’une seule et même tribu, alors même que les régimes précédents avaient tenu compte des caractéristiques tribales.

Renan pense qu’il faut entretenir une histoire commune, des souvenirs communs, des références historiques communes, dans lesquelles, le plus possible d’individus membres de la nation, puissent se retrouver. Au lieu que les groupes dominés (beïdanes, harratines, soninkés, wolofs, Haalpoular) s’unissent pour se retrouver, ils continuent à s’auto dominer. Cette situation a permis au petit groupe aux mannes du pouvoir à se maintenir et à perpétuer ce modèle.

Pour mettre fin à ce modèle Etat-tribu-communauté-caste, il faut que la majorité dominée se rende compte de sa situation de dominés. Les dominés doivent arrêter de se dominer. Cela n’a aucun sens. Nous devons reconnaître notre situation de dominés et celles et ceux qu’on croit à notre tour dominés de s’unir avec eux pour se libérer ensemble.

Vive la Mauritanie citoyenne.


Bulaye Kaba via Tidiane Diarra par  facebook 

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