Translate

lundi 15 juillet 2013

Les signes ostentatoires du racisme d’Etat en Mauritanie.




Ce texte est motivé par les nombreuses réactions suscitées par un article que j’avais publié l’année dernière en début juillet je crois, au journal hebdomadaire La Tribune en son numéro 600 du 02/ juillet /2012 et que j’avais intitulé « Ces graves menaces d’instabilité qui, à l’instar du Mali, pèsent sur la Mauritanie ». Mon objectif dans cet article n’était nullement de plancher sur le phénomène du racisme d’Etat en Mauritanie, mais tout simplement de soumettre au débat mon analyse des « menaces » qui pesaient et pèsent encore sur notre patrie. Il s’agissait donc bien pour moi d’impulser un débat sur le sujet peu fréquenté de la question sécuritaire en Mauritanie ; seulement, les lecteurs, du moins pour la majorité d’entre eux, n’ont rebondi que par rapport aux « facteurs internes », particulièrement sur celui du racisme d’Etat et de l’esclavage comme sources potentielles de déstabilisation de la Mauritanie. Ce qui n’étonne point le critique littéraire que je suis : un texte, à partir du moment où il est soumis à l’appréciation du public, subi parfois de telles appréhensions que son auteur s’en trouve bien des fois surpris. A ce sujet, les nouvelles théories littéraires soulignent l’avènement du « texte des lecteurs »…

Parmi les nombreuses réactions engendrées par ce fameux article, disais-je, il y’en a une qui a particulièrement attiré mon attention : celle d’Ahmed Aly Ould Jiddou. Sans doute à cause du sérieux et de la retenue dont il y a fait preuve. Il va sans dire que j’ai apprécié très positivement le déploiement de l’argumentaire en réfutation de ce journaliste (ancien officier) qui force le respect. J’aurai voulu lui répondre immédiatement mais mon temps était alors complètement accaparé par mes travaux académiques qui ne pouvaient hélas attendre ; aussi je m’en excuse.

C’est donc seulement maintenant que j’ai le temps de poursuivre ce débat fort intéressant, d’abord pour contribuer modestement à l’évolution positive des mentalités à travers le croisement des opinions contradictoires ensuite dans l’espoir intime que celle-ci aboutirait à la résolution du crucial problème de la cohabitation qui plombe plus qu’on ne l’imagine, le développement intégral de notre pays.

Pour illustrer le caractère transhistorique du racisme d’Etat en Mauritanie, j’avais souligné que même face à la mise à mort (par décision de justice) les Mauritaniens, selon qu’ils soient noirs (Négro-africains et Hratines) beïdanes (blancs) ne sont pas traités de la même manière. J’avais alors illustré ce fait en mentionnant que la seule fois où des présumés putschistes (le terme présumé se justifie ici par le fait qu’il s’agissait d’une intention de coup d’Etat, l’acte n’ayant pas connu un début d’exécution) ont été condamnés à mort et exécutés, ce fut avec la « tentative »[1] de coup d’Etat des Négro-africains en 1987. Les officiers Ba Seydi, Sarr Amadou et Sy Saïdou furent passés par les armes après un simulacre de procès dans l’opacité d’une caserne militaire. Quand on sait que durant les 15 dernières années du règne de Ould Taya il y a eu en moyenne une « tentative » de coup d’Etat par an et que pour ces « conspirateurs », tous arabo-berbères, il n’y a jamais eu aucune exécution ; que le coup d’Etat de Ould Hanana s’est traduit par 26 morts (chiffre officiel) et que malgré le caractère de flagrant délit de ce putsch, il n’y a eu aucun condamné à mort, il devient évident que les exécutés du coup d’Etat de 1987 l’ont été parce qu’ils étaient noirs. C’est cette déduction historique que monsieur ould Jiddou a voulu remettre en cause en invoquant notamment un contre exemple : l’exécution en 1979 de Kader, Niang, Ahmed Salem Ould Sidi, Seck (pour ne citer que les plus connus d’entre eux) à la suite de leur tentative de renverser le régime de Mohamed Khouna ould Haïdalla. Mais l’information que notre ami Ahmed ould Jiddou  a alors occulté sans doute pour rendre son « contre exemple » acceptable, c’est que, au plan pénal, l’exécution des putschistes de 1979 se justifie amplement du fait justement du passage à l’acte qui consacre de facto à leur action un caractère de flagrant délit. Ces vaillants hommes (on ne peut ne pas admirer Kader, Niang et leurs amis si on est un temps soit peu, sensible à la bravoure humaine) ont été arrêtés les armes à la main après avoir ébranlé d’une manière fort épique les institutions de l’Etat.

Or, ce ne fut pas le cas de l’intention de putsch de 1987. Ceux-là auraient peut être eu l’intention de renverser le régime de Taya (c’est du moins ce que stipule Boye Alassane Harouna dans son ouvrage-témoignage intitulé J’étais à Walata ou le racisme d’Etat en Mauritanie Paris, L’Harmattan, 1999) mais jamais leur intention ne s’est traduite en acte. Aucune juridiction sérieuse ne condamne un citoyen à la peine capitale simplement parce qu’il a imaginé renverser l’ordre établi.

Je maintiens donc que dans l’histoire de la Mauritanie, la seule fois où des militaires ont été exécutés par décision de justice parce qu’ils ont songé à s’accaparer du pouvoir, ce fut des Négro-africains. Cette conclusion est d’autant plus irréfutable que le « putsch » de 1987 a été le seul connu où les acteurs étaient tous noirs. Ba Seydi, Sy Saidou et Sarr Amadou ont été mis à mort parce que, selon les régimes racistes qui se sont succédés à la tête de la Mauritanie jusqu’au jour d’aujourd’hui (soulignons l’exception du régime hélas trop bref de SIDIOCA – sans doute a-t-il été renversé parce qu’il ne voulait pas perpétuer le système esclavagiste et raciste) en tant que Noirs, ils ne devaient pas songer à diriger la Mauritanie. Et lorsqu’une telle idée leur passe par la tête, il fallait que s’abattît sur eux la plus lourde main qui soit, pour l’exemple. C’est aussi cela le racisme d’Etat en Mauritanie.

En outre, s’il est nécessaire de recourir à l’analyse pour prouver que les composantes nationales, selon leur langue et la couleur de leur peau, ne sont pas égaux devant la peine de mort, il suffit d’observer objectivement la scène du public en Mauritanie pour se rendre compte du caractère fondamentalement raciste de l’Etat mauritanien y compris sous sa forme républicaine. Pour vous le prouver je vais m’arrêter successivement sur quelques symboles de l’Etat et non des moindres.


1. L’hymne national


L’hymne national est, par définition, cette musique-symbole qui, associé au drapeau national, incarne l’unité de la nation solennelle. C’est pourquoi aux côtés des couleurs (étoile et croissant jaunes sur fond vert) l’hymne national retentit à chaque fois qu’il est question de la Nation mauritanienne[2]. Aussi, le discours du président de la république à la radio comme à la télévision est annoncé et clôturé par l’hymne ; lors de ses sorties à l’étranger, il est rendu hommage à la nation mauritanienne par la montée des couleurs et le jeu de l’hymne national en sa présence. Enfin c’est le caractère sacré de ces symboles qui « impose » que les citoyens doivent se figer devant eux dès qu’ils sont mis en mouvement, c’est du moins ce que veut la logique républicaine.

Et pourtant en concevant l’hymne national l’Etat a oublié le principe fondamental sans lequel, il ne saurait y avoir de nation unie au sens politique : l’égalité de tous ! En effet, en décidant de ne composer l’hymne national qu’en arabe, l’Etat exclut symboliquement les Négro-africains et leur ôte toute possibilité de ressentir, face à la levée des couleurs nationales, cette émotion patriotique qui fonde l’appartenance intrinsèque du citoyen à la patrie.

Dans tous les pays africains anciennement colonisés où sont parlées plusieurs langues, le français a été adopté comme langue de l’hymne. La Mauritanie qui, en plus de présenter 4 langues, comporte deux races, aurait eu plus de raison de recourir au français comme langue transnationale, mais pour cela, il aurait fallu que ses dirigeants ne soient pas racistes. Je vois déjà se formuler les réponses de quelques nationalistes étroits qui ne manqueront pas de souligner que le français est une langue étrangère et qu’en tant que telle, elle ne peut véhiculer le « Moi » mauritanien. Je reviendrais alors à la charge pour dire que le français a certainement été la langue du colonisateur, mais que la réalité pragmatique est là : qu’on le veuille ou pas, en dépit de tous les complexes, le français qui n’est mentionné nulle part dans notre constitution est bien devenu une langue mauritanienne qui est étudiée à l’école, parlée dans les foyers, au marché et dans la rue.

Je tiens toutefois à lever l’équivoque au cas où certain seraient tentés de croire que je suis un de ces défenseurs inconditionnels du français. Comme la plupart des Négro-africains, je ne défends pas le français ! Le français n’en a d’ailleurs pas besoin ! Les langues que nous défendons légitimement, au nom du droit à l’égalité, ce sont nos langues nationales (pulaar, soninké, wolof) que les différents régimes se sont efforcés de reléguer au stade de langues de seconde zone, juste bonne pour colorier une diversité démagogique mais qui ne sont jamais bonnes pour être enseignées à l’école. En imposant à nos langues et à nos cultures un statut folklorique, les dirigeants racistes de la Mauritanie les étouffent – et nous avec – insidieusement mais surement !

Supposons que c’est l’opinion anti-impérialiste qui domine l’opinion mauritanienne et que l’on ne voudrait pas utiliser le français dans les communications officielles (l’hymne est une communication), alors ceux qui ont choisi de diriger la Mauritanie doivent traiter les composantes racio-linguistiques mauritaniennes sur le même pied d’égalité en considérant objectivement que le Peul, le Soninké et le Wolof de Mauritanie ne sont pas des Arabes et ne le deviendront jamais. Ils doivent donc recourir à toutes les langues de la Mauritanie à chaque fois que l’enjeu est national.

Au nom de cet impératif de justice, l’hymne national doit être recomposé dans toutes les langues de la Mauritanie ! Sinon, eh bien tel qu’il est actuellement notre hymne restera la seule propriété de la communauté beïdane. Comme nous le voyons maintenant, à part ceux d’entre eux qui assument des fonctions d’Etat, les Négro-africains passent impassibles devant cette musique nationale eux qui frémissent pourtant lorsque chante Hamady Gawdel, Demba Tandia, Youssou Ndour ou Yéro minen Tey !


2. L’équipe nationale de football


Cet exemple est très important parce qu’il aura été constaté même par la frange de la jeunesse mauritanienne qui n’a pas été à l’école ou n’a pas eu la chance de pousser son instruction assez loin. Plusieurs fois des jeunes négro-africains m’ont posé la question de savoir qu’est ce que c’est que « Mourabitounes », nom donné à l’équipe nationale de Mauritanie. Quand je leur réponds que les Maurabitounes sont des tribus arabo-berbères qui au 11ème siècle ont propagé l’Islam du nord au sud de la Mauritanie, ils ne comprennent pas pourquoi leur équipe nationale s’appelle ainsi. Parce que les jihadistes de l’Islam qu’ils connaissent et en qui ils se reconnaissent s’appellent « Futankoobè » avec à leur tête un certain Elhadj Oumar Tall !

Le fait est que, là aussi, au lieu de proposer un nom qui fédère tous les Mauritaniens comme on le voit partout en Afrique, les dirigeants de notre pays qui, même dans le domaine du jeu ne peuvent faire abstraction de leur sectarisme raciste sont allés choisir un nom purement arabo-berbère pour une équipe d’un pays où plus de 80% n’est pas arabe et se définit ontologiquement comme différent de l’arabité tout en revendiquant son appartenance irréversible à l’Islam. De sorte que les Négro-africains et les Hratines pourtant majoritaires dans l’équipe nationale se sentent à la fois stupides et idiots quand on les appelle les « Mourabitounes », quant à ceux qui sont censés les supporter ils ne voient tout simplement aucune raison de supporter une équipe qui arbore un nom qui les exclut dans l’histoire des couleurs que l’équipe doit représenter.

Dès lors, il n’est point étonnant que notre équipe nationale n’ait jamais remporté, non pas la coupe du monde ou d’Afrique, mais tout simplement une compétition sportive bien plus modeste. Je vous le dis, comme des millions de Négro-africains de ce pays, je ne supporterai jamais une équipe dont le nom me renvoie constamment mon exclusion dans mon propre pays. S’il en est ainsi le peul que je suis, qu’en sera-t-il pour les Hratines ? Eux pour lesquels « Mourabitoune » signifie « anciens maîtres » donc esclavagistes. Car, faut-il le rappeler, l’Islam propagé par les Mouraboutines est cet Islam malikite d’orientation esclavagiste que toutes les organisations anti-esclavagistes n’ont toujours pas réussi à débouter malgré leur abnégation ! L’incinération du « Khalil » par Biram Dah Abeid, président de l’IRA s’inscrivait d’ailleurs, à juste titre, dans la déstabilisation symbolique de ces références esclavagistes.

Pourquoi, à l’instar du Mali, du Sénégal, du Maroc et de bien d’autre pays en Afrique, les dirigeants de la Mauritanie n’ont pas choisi un nom symbolique d’animal pour fédérer tout le monde ? Pourquoi l’équipe nationale de Mauritanie ne s’appellerait pas, par exemple, les « Taureaux » ? Toutes les composantes nationales se reconnaissent dans ce bel animal !

Evidemment pour y songer il fallait  ne mépriser l’autre, les Noirs qui doivent s’assimiler ou disparaitre. Il y a décidément en Mauritanie de l’injustice à faire disparaitre tout l’oxygène de l’Humanité !


3. Les radios et télévisions nationales


Ce sont là d’autres lieux où le racisme d’Etat se manifeste de manière frappante. Dans ces médias de masse, tous les programmes qui sont plus ou moins importants sont à la fois réalisés par des Arabo-berbères et diffusés systématiquement en langue arabe. A la télévision et à la radio, les deux grandes éditions du journal de la mi-journée et de la soirée sont diffusées en arabe (bien détaillé) et en français (juste un résumé). Après le journal en arabe et en Français, les citoyens négro-africains sont en droit d’attendre qu’on leur communique les informations qui touchent à la vie de leur pays dans leurs langues, mais les directeurs de ces médias (généralement choisi à dessein parmi les nationalistes arabes les plus étroits) préfèrent passer des clips d’artistes maures si aucun débat politique ou religieux en arabe n’est prévu. Autant dire qu’en Mauritanie, les directeurs des télés et radios préfèrent égayer la communauté mauresque (luxe) que de permettre aux citoyens négro-africains de s’informer (le fondamental). C’est à croire que tout est fait pour détourner les Négro-africains de la télévision nationale. Comment regarder une télévision ou écouter une radio de son pays si à longueur de journée, on n’a aucune chance d’entendre parler sa langue ou regarder un programme culturel où l’on pourrait se retrouver ? Mieux, plus de 90% des présentateurs des journaux et autre émissions sont beïdane. Le mot d’ordre est clair : il faut, contre toute réalité, véhiculer l’image d’une Mauritanie à majorité beïdane, si ce n’est celle d’une Mauritanie exclusivement beïdane.

Que dire des autorisations d’ouverture de radios et de télévisions (licence) depuis qu’il a été voté la loi de libéralisation des ondes ? Dans le groupe de ceux qui furent autorisés à ouvrir des chaines de radio ou de télévision, il n’y a pas un seul Noir !

La conséquence de cette exclusion des populations noires des médias de masse est tout simplement incalculable sur le long terme. En effet, il est à présent établi que les Négro-africains, dans leur écrasante majorité ne captent pas les radios et télévisions nationales. Ils préfèrent tous, même en payant au prix fort, regarder les chaines sénégalaises et maliennes où ils ont la chance de suivre des programmes où ils se retrouvent ne serait-ce que culturellement. Alors le fossé entre citoyens noirs d’une part et arabo-berbère d’autre part se creuse de plus en plus car en ne regardant ni les mêmes infos ni les mêmes programmes annexes, on ne saurait avoir les mêmes références ni les mêmes avis sur l’essentiel. Tout cela ajouté à la frustration d’être exclu, c’est tout simplement tout espoir de construction d’une Nation mauritanienne unie qui s’éloigne.


4. Les forces armées et de sécurité


La configuration présentée par nos forces armées et de sécurité constitue le quatrième signe ostentatoire du racisme d’Etat en Mauritanie. Il ne s’agit pas pour moi ici de revenir sur le génocide perpétré sur la composante négro-africaine de Mauritanie par les forces armées et de sécurité sur commande des plus hautes autorités du régime de Mouawiya ould Taya. Evénements qui ont entaché à jamais les treillis des armées car en s’adonnant à une tentative d’extermination de citoyens qu’elles avaient le devoir de défendre, notre armée s’est transformée en milice obéissant aux ordres d’une oligarchie désespérément raciste. En exécutant par trahison (extrajudiciaire) plus de 500 de leurs frères d’armes uniquement parce qu’ils sont négro-africains, nos militaires se sont à la fois décrédibilisées et déshonorées.

Enfin en ne diligentant pas en leur sein une enquête, en dehors de toute pression, pour faire la lumière sur ces purges racistes dans leur rang, les forces armées et de sécurité écartent leur chance de redorer leur blason face à la Mauritanie biraciale et multiethnique. De toutes les façons, tout porte à croire que ceux qui les dirigent assument et même revendiquent ce caractère exclusivement arabe de leurs corps. Il suffit pour s’en convaincre de s’arrêter sur deux exemples :

- le lycée militaire, sis à côté du ministère du pétrole, présente des élèves à plus de 95%  Arabo-berbères Comment, dans une Mauritanie composée à plus de 80% de Noirs (Hratines, Peuls, Soninkés et wolofs) une école nationale peut afficher une telle disproportionnalité. C’est là un fait qui frise l’arrogance gratuite et pousse vraiment à la révolte des jeunes générations ;

-L’encadrement des forces armées (officiers et sous-officiers) affiche les mêmes déséquilibres terribles entre les composantes du pays. Les Hratines et les Négro-africains sont relégués aux postes de soldats subalternes et à la limite de sous-officiers alors que plus de 95% des postes d’officier sont réservés aux Arabo-berbères. Il suffit pourtant de la moindre lucidité pour savoir que si ce sont généralement les officiers qui font les coups d’Etat, les révoltes des soldats se traduisent toujours par des conséquences encore plus dramatiques.


Conclusion


Au regard de tout ce qui suit, il apparait que le caractère raciste de l’Etat mauritanien ne fait aucun doute. Le Mauritanien selon qu’il soit Hratine, Peul, Soninké, Arabo-berbère ou wolof est traité en fonction de son origine raciale et/ou linguistique. Les manifestations populaires organisées par Touche pas à ma Nationalité (TPMN) pour combattre l’exclusion sans commune mesure des noirs dans les enrôlements et  défendre des langues nationales d’une part, celles d’IRA-Mauritanie contre l’esclavage toujours pratiquée sur une partie des Noirs mauritaniens d’autre part, constituent, s’il en était besoin, des faits incontestables de l’existence dans notre pays des crimes de racisme et d’esclavage.

Dès lors, il n’est pas étonnant qu’un commerçant maure de Kaédi ose porter la main sur une femme noire qui pourrait être sa mère, juste à la suite d’une altercation bénigne. Ce n’est pas étonnant, non plus que, conduit au commissariat après une plainte de la victime, le commissaire relâche le Beïdane quelques minutes après en classant le dossier sans suite.

Enfin, la réaction des jeunes de Kaédi qui, dans un mouvement de ras-le bol se sont mis à tabasser les Beïdanes à leur portée, peut paraitre disproportionnée, mais exprime le désespoir d’un peuple soumis à l’oppression multiforme sans aucune possibilité de recourt.

Malheureusement le Président Mohamed ould Abdel Aziz semble croire que les maux de la Mauritanie se résument à deux : la pauvreté et la corruption. Je ne nie pas que ces deux problèmes soient d’une grande importance. L’objectivité scientifique voudrait d’ailleurs que l’on reconnaisse que le président actuel capitalise de réels acquis dans la lutte contre la pauvreté et la gabegie. Mais là où il commet une erreur monumentale, c’est dans sa négligence du crucial problème de la cohabitation. Il doit savoir que plus que la lutte contre les voleurs de la république et la nourriture basique, la Mauritanie a plus que jamais besoin de se retrouver avec elle-même, de discuter (débat national) pour s’entendre, non pas sur tout, mais sur l’essentiel : l’institution d’une citoyenneté mauritanienne non raciste et non esclavagiste. Je souhaite que le Président Aziz et son gouvernement se rendent vite compte de l’impératif de ce débat national, autrement, je crois que dans un avenir proche, ils le découvriront mais à leur dépend ; j’espère que ce jour là, il ne sera pas trop tard pour la Mauritanie…



Mamadou Kalidou BA

Professeur à l’Université de Nouakchott (Mauritanie)

Nouakchott le 15/07/2013





[1] Je mets entre guillemets le terme « tentative »  parce qu’il est impropre pour désigner une simple intention et non pas un acte. Cette différence est de taille tant dans le droit pénal musulman que dans  le droit pénal occidental.


[2] L’honnêteté intellectuelle nous oblige à lever l’équivoque sur l’emploi des termes « Nation mauritanienne ». Cet emploi est purement démagogique car dans les faits la « Nation mauritanienne » au sens politique est plus un projet qu’un fait accompli. En toute objectivité la Mauritanie est composée de cinq nations au sens anthropologique du moins…

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire