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lundi 27 mai 2013

Coup d’État en Mauritanie: crime ou bénédiction? Suite et fin



Maawiya Ould Taya

 Le 12-12-1984 fût une aubaine pour la majorité des mauritaniens. L'homme de l'ombre fidèle parmi les fidèles du président Haidalla a pris le pouvoir avec la bénédiction de la France. Cet officier dit « moderne » dont l'épouse une libanaise qui avait tout fait pour soustraire Maawiya des « mauvaises fréquentations » endogènes, avait suscité au début de sa prise du pouvoir de l'espoir vers un avenir radieux pour son pays. Tous ceux qui le connaissent parlent d'un officier calme, au sang froid, fuyant les mondanités et très peu porté sur la matière. Peu sont les psychanalystes capables d’ « exorciser » la pensée des personnes renfrognées sur elles-mêmes comme le président Maawiya. Cette catégorie d'individus qui ne parlent pas beaucoup est  le plus souvent porteuse d'une double personnalité; ils sont soit sincères soit pervers. Le démon est dans le corps. Sinon comment comprendre qu'une simple revendication identitaire puisse aboutir à des peines de prison mortelles lors de la sortie du manifeste du négro-mauritanien opprimé? Cette situation accouchera d'une tentative de coup d'Etat en octobre 1987, d’une tension entre la Mauritanie et le Sénégal, en plus des exécutions extrajudiciaires ou passif humanitaire de 1989-1990 sur les populations négro-mauritaniennes. Première gaffe du régime. La deuxième erreur est la déconfiture de la société mauritanienne, son émiettement, sa perte de repères, d'où une caste de troubadours moins habile que les traditionnels griots. Car si Maawiya n'était pas porté lui-même sur l’argent, il a cependant laissé ses laudateurs et leurs cornemuses instaurer un régime gabegique. Craint, seul maitre à bord, l'homme était débordé parce que ceux qui étaient sensé le proteger, le conseiller ne s'occupaient en fait que de leur propre enrichissement. Le 8 Juin 2003 fût un choc et Maawiya a compris qu'il n'avait pas de soutiens indefectibles.L'Armée laminée,les terroristes en profitèrent pour porter des coups mortels aux unités combattantes mauritaniennes. Les différentes réunions sécuritaires entre Maawiya et ses chefs de corps (Armée, Police, Gendarmerie) déboitaient de leur coulissement naturel pour aboutir à une autre « stratégie militaire » diligentée par un président de la république en perte de vitesse! Les chefs militaires et sécuritaires commencèrent à comprendre que  Maawiya ne jouissait plus de toutes ses facultés mentales. Deux clans se formèrent et se mirent en embuscade pour prendre le pouvoir: celui d'abord du chef d'Etat-major le colonel Arbi Ould Jedeine actuel vice-président de l'Assemblée suivi des colonels Alioune Ould Mohamed, chef du 3ème bureau, Cheikh Ould Chrouf, cdt le BCS, Sidi Mohamed Ould Vaidé cdt le 2ème bataillon des commandos, Abderrahmane Ould Lekwar de la marine et d'autres qui sont encore sous le drapeau et  dont je me réserve le devoir de ne pas citer les noms. Ce groupe était d'ailleurs l'embryon des « anti-AZIZ »vcar les officiers parents du président Ould Taya voyaient en AZIZ,  depuis la création du Basep (fin1989-début 1990) un éventuel «  futur » putschiste. L’autre clan comprenait les Dupond-Dupont de l'Armée à savoir AZIZ et Ghazwani, le colonel Cheikh Ould Bayé ennemi juré de son chef  Abderrahmane Ould Lekwar et  enfin le grand cousin Ely Ould Mohamed Vall qui était jusqu'à la présidentielle de 2007, adulé, respecté.
  Le clan Aziz avait deux avantages: la confiance de Maawiya. Il parait qu'Ould Taya avait été mis en garde par ses proches hommes d'affaires contre la déferlante « ewlad Eleyé » sans changer d'attitude ni de méthode dans sa chaine de sécurité rapprochée. Ensuite le deuxième atout provient de la témérité du commandant du Basep et du courage du colonel Ely Ould Md Vall. Ce dernier l'a démontré lors de la guerre du Sahara à partir de témoignages de soldats ayant servi avec lui. D'ailleurs sa proximité d'avec Maawiya date de l'attaque de Zadnas en 1977 là, où l'ancien président encerclé et sur le point d'être capturé par les combattants sahraouis, sollicita l'intervention du lieutenant Ely pour l'exfiltrer. En général les renforts mauritaniens pendant que la guerre battait son plein, faisaient 48 heures pour parcourir 40 km en « land-rover » british ou santana! Toujours est-il que tous les membres du clan de l'Etat-major et leurs acolytes ont été mis aux arrêts dans la nuit du 2 au 3 Aout 2005 par AZIZ et Ghazwani avec le concours des unités du Basep. Le chef d'Etat-major adjoint Abderrahmane Ould Boubacar a été amadoué par Ely Ould Md Vall afin de prendre la place d'Arby Ould Jedeine .Maawiya qui était en visite à l'extérieur n'a pu être  « préservé de ses amis » encore moins se « charger de ses ennemis ». Du 12-12-1984 au 03-8-2005, vingt et un an sont passés depuis le coup d'Etat contre Haidalla, soient plus de quatre mandatures. Un bilan mitigé pour ne pas dire médiocre, des objectifs en berne et une société en déliquescence, d'où un héritage encore difficile à gérer.

  Mohamed Ould Abdel Aziz

    Personnage atypique, scrabeux, il est indéniable que Mohamed Ould Abdel Aziz aura marqué toute la Mauritanie et même au-delà depuis le 03-8-2005.Cet homme est inclassable et pour le disséquer, commençons d'abord par le coup d'Etat du 6 Août 2008 qui va propulser Ould Abdel Aziz au devant de la scène nationale et internationale. Ce jour, je me suis rendu comme chaque matin dans les locaux du Calame vers 8h 30mn. Dans le bureau du Directeur Ahmed Ould Cheikh, il y avait également Abdallahi Ould Hormtallah qui semble être en disgrâce du président Sidi Ould Cheikh Abdallahi, les journalistes Seck Amadou et Ould Moine .Dès mon arrivée, Ahmed me dit: tu n'es pas au courant, ton ami le général Aziz a été ligoté par un commando tôt ce matin, d'après Al Jezira? Je leur ai répondu : Aziz ligoté, d'ailleurs par qui car il vendra sa peau très chère? Quelques minutes plus tard et pour parer au doute, je composais le numéro fixe d'AZIZ: « qu'est-ce qui se passe, mon général, il parait que tu es ligoté »? Aziz au bout du fil de répondre en hassanya: comme tu as probablement entendu à la radio, Ely je n'ai pas le temps de discuter, à plus tard. J'ai dit à l'assistance dans les locaux du Calame qu'un homme ligoté ne peut être en mesure de parler au téléphone. Tout le monde commençait à s'agiter en quête d'information fiable. Ould Hormtallah, contacté par une « radio arabe » d'un pays lointain commentait déjà la destitution des généraux Aziz, Ghazwani, Ahmed Ould Bekrine de la Genarmerie, Felix Negri de la Garde Nationale. Au bout d'une heure je partais au ministère de la Défense, où je croisais un colonel qui m'interpella: le colonel Mohamed Ahmed Ould Smail (l'officier qui devrait remplacer AZIZ ) a déjà pris les consignes du Basep, Aziz est aux arrêts de rigueur comme s'il voulait me dire :bien pour sa gueule en sachant que nous étions en rapport. Ce que semble confirmer tout le personnel du ministère, même si  je dis à l'un d'entre eux avoir eu le cdt du Basep au téléphone il y a un peu plus d'une heure. Après quelques longues minutes le téléphone fixe d'un officier du ministère sonna dans son bureau. Il me regarda et dit: Ely, tu as raison le général Felix vient d'embarquer le 1er ministre Yahya Ould Waghf avec une hargne qui lui était inhabituelle selon les témoins. Car ce jour le chef de la Garde Nationale était comme un lion blessé. En effet Felix Negri qui le 8 Juin 2003 au BB(bataillon blindé) assis dans une chambre avait confondu une baguette de pain d'avec la crosse d'un fusil kalach, s'est avéré le 6 Août 2008 plus combatif que tous. Par contre l'Etat-major qui incarnait  la légitimité vis à vis du président Sidi n'a pas pu ou su déjouer, au moins contenir le coup de force à mon avis pour les raisons suivantes. Il n'y avait aucun homme d’envergure, téméraire de la trempe d’AZIZ et Sidi  mal conseillé sur les questions militaires  n'a pas trouvé l'astuce pour s'en débarrasser. La nomination d'Abderrahmane Ould Boubacar comme chef d'Etat-major était une erreur monumentale. Il a tout gâché avec son manque d'allant et d'initiative ponctuelle. Pourtant dès son arrivée à l'Etat-major il fût  accueilli, installé dans son bureau ( qu'il connait bien d'ailleurs) par les colonels Ely Ould El khal son adjoint(qui s'est aussi bien distingué cette matinée malgré la frousse  qu'on lui reconnait) et Hamada Ould Boidé à qui on devrait donner le BCS. Il suffisait de faire sortir 4 ou 5 « Toyota »armées, direction le Basep ,vavoir la volonté  de défendre la démocratie tout en se préparant au combat. Noble initiative, non? Et la tentative de coup d'Etat allait prendre une autre tournure. Aziz est certes téméraire mais pas bête car, quand il s'aperçoit que son adversaire ne recule pas après l'avoir chargé, il négocie. Voir le colonel Ould Boubacar aujourd'hui demander à Aziz de démissionner, est une aberration. Quand on a tout fait pour être officier supérieur sans l'étoffe, ensuite chef d'Etat-major sans la compétence requise et après avoir échoué devant l'Histoire, on se casse. Encore une fois l'Etat-major national a courbé l'échine devant le Basep qui n'est pourtant qu'une unité comme les autres avec  des soldats sûrement pas prêts de mourir pour AZIZ.
 Le 6-8-2008 entre 11h et midi le coup d'Etat était consommé et AZIZ a commencé ses manœuvres qu'on ne lui connaissait pas en premier lieu :mentir d'abord au chef de file de l'opposition Ahmed Ould Daddah pour qui, le CDT du Basep n'était  que de passage; mentir au peuple mauritanien en proférant des slogans de gauche dans le seul but d'engranger un pactole par tous les moyens illégaux. L'homme a du culot car en général  ceux qui volent, détournent, dévoilent leur peur à la moindre incartade. Chez AZIZ, c'est le comble; non seulement il triche, vole, blanchit mais méprise également, voyage beaucoup comme s'il narguait et ses concitoyens et ses frères d'Armes. D'ailleurs ses relations avec les êtres humains se limitent à trois critères de basse besogne;1/ Aziz a besoin d'informateurs ,2/AZIZ veut des personnes qui lui fructifient ses affaires tout en sachant que c'est lui qui doit avoir toujours le dessus donc le gros lot;3/ AZIZ est un adepte du poème d'Horace du « carpe diem » et il faut des intermédiaires sans scrupules pour le satisfaire .S'il constate que vous ne répondez pas à l'un de ces critères, il vous ignore. Des personnalités comme Mohamed Ould Bouamatou, Ely Ould Mohamed Vall ayant les mêmes traits génétiques que lui ont refusé de se plier à ce « diktat », d’ou la cassure. L'on se demande d'ailleurs comment un président dont le fils a tiré sur une jeune fille la rendant à jamais cul-de-jatte, sur lequel on a tiré, qui, selon des enregistrements aurait blanchi l’argent, trafiqué la drogue, trahi les siens..etc..puisse encore bénéficier de légitimité, de popularité encore chez certains citoyens? C'est incompréhensible même s'il est dit que les peuples n'ont que les dirigeants qu'ils méritent! Personnellement je ne me reconnais plus en AZIZ. Cet officier a me semble-t-il une double personnalité. Toute sa politique est basée sur l'obsédante quête d'argent. Même sa façon de distribuer de l'argent mensuellement à ceux seulement qui le soutiennent rappelle les pratiques du patron du cartel de Medellin, Pablo Escobar. D'où vient cet argent? Du contribuable? , dans ce cas il doit être reparti sur toutes les couches défavorisées du pays, sous forme d'allocations familiales, d'aide aux femmes divorcées élevant seules des enfants etc..
    Aziz a déjà échoué et ceux qui le soutiennent regretteront toute leur vie. Car le jour où AZIZ sera déchu les mauritaniens se rendront compte de l'ampleur des dégâts qu'on nous cachait, des accords secrets pour piller la Mauritanie. On se demande si une partie de notre pays n'a pas été déjà vendue à des multinationales étrangères? Alors qui succédera à AZIZ, cet homme qui ne lâchera jamais le pouvoir par voie d'alternance pacifique? On ne saurait terminer sans rappeler les propos d'un député de l'opposition qui disait: l’auteur d'un coup d'Etat qui a réussi est un héros, s'il échoue, on le traite de criminel. Faut-il souhaiter un coup d'Etat réussi en Mauritanie? Certes il est préférable un soulèvement populaire qu'un coup d'Etat qui est le plus souvent un éternel recommencement si son instigateur n'est pas un vrai patriote. Pour le cas précis du général AZIZ, qui contribue à la récession de son pays en déposant de faux billets à la banque centrale, afin de récupérera les vrais, en procédant au trafic de drogue, en fermant des établissements pourvoyeurs d'emplois, en méprisant son peuple et j'en passe, un coup d’État le destituant serait-il un crime ou une bénédiction? La balle est dans ton camp « hypocrite lecteur, mon semblable mon frère »!

   ELY OULD KROMBELE

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