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samedi 30 mars 2013

Et si nous étions tous des haratines? Par le capitaine Ely Ould Krombelé .


Ich bin ein berliner (je suis un berlinois)s'était écrié le président John F Kennedy le 26 juin 1963 lors d'une visite en Allemagne à Berlin-Ouest enclavée,coupée en deux à cause du blocus de 1948.Si Kennedy a tenu ce genre de discours c'est que le peuple allemand martyrisé,défait,avait  autant besoin  d'un soutien moral du monde dit libre par rapport au "rideau de fer" qui s'est abattu sur l'autre Allemagne coté soviétique,mais aussi d'une compassion pour une guerre que le 3eme Reich avait inopportunément déclarée et perdue.Plus qu'un soutien moral,c'est un plébiscite en faveur de leur cause que les Haratines sollicitent auprès de tous les esprits épris de justice.   Pourquoi ne serions-nous pas un temps tous des haratines ,ce peuple qui a tant souffert,et qui souffre encore et encore?Certes le comportement de quelques  individualités haratines qui,une fois montées sur le piédestal ,refusent   désormais de  descendre jusqu'au parterre  pour continuer le combat à la base,doit-il nous interpeller.S'il n'existe que du particulier, il ne peut cependant « avoir de science que du général ».Vouloir trouver une solution à la question haratine en évoquant ça et là des singularités ou des attitudes intrinsèques, propres à tel ou tel hartani  ,relèverait de l'alchimie.Au delà de la problématique culturelle ou historique soulevée par l'ensemble haratin ,l'équation ne trouvera sa résolution définitive que dans une approche sociologique  tenant compte surtout de la spécificité spatio-temporelle de ce qu'on appelle « Mauritanie ». Dans cette partie de l'Afrique,musulmane de rite malékite,les textes régissant les relations entre maître et esclave sont discriminatoires : le maître est blanc,l'esclave noir.Et si l'inverse se produisait,des maures blancs réduits en esclavage par des haratines,quelle sera la lecture des textes ? Qui a dit qu'il y a deux choses sans fin :l'univers et la bêtise humaine?

    Composante non négligeable, pour ne pas dire épine dorsale de la communauté mauritanienne,le passé,le présent et le futur des haratines n'ont cessé d’être relatés surtout depuis l’avènement de la « démocratie ».On constate même tacitement une émulation entre maures blancs et négro-mauritaniens depuis la création de l'IRA de Biram Ould Abeid quant à la captation ou l'empathie  à l'égard des haratines. Cette infantilisation du hartani assis entre deux chaises,tiraillé par deux pôles "l'un voulant le garder,l'autre le voulait vendre", a tendance à corrompre  la noblesse de la lutte émancipatrice en la réduisant à un jeu de yo-yo.Pour juguler ce manichéisme ambiant,il devient impérieux aux descendants d'esclaves de prôner une troisième voie salvatrice,seul rempart à la gratuité de l'arabité qui leur est offerte mais aussi aux cornemuses de la négritude .C'est aux haratines de décider s'ils veulent être des peuls ou des maures ou ni-ni.




Depuis la création du mouvement « el hor » il y a environ 35  ans,la lutte anti-esclavagiste a perdu du souffle et ceci pour les raisons évidentes que nous tenterons de faire ressortir.Il est incontestable que la création de l'IRA a donné une bouffée d’oxygène aux défenseurs des droits de l'homme en général et aux abolitionnistes en particulier.Avec l'IRA ,jamais on a  autant  parlé de la lutte contre l'esclavage à l’intérieur,aussi bien qu'à l’extérieur de la Mauritanie.Les pouvoirs publics sentant cette nouvelle menace,par rapport à la traditionnelle opposition dont ils connaissent les limites,les tenants et aboutissants  pour mieux l'endiguer,ont infiltré l'IRA, en la poussant dans ses derniers retranchements. L’incinération des livres,l'inculpation  du président de l'IRA portèrent un coup de grisou à l'opposition radicale en la divisant en pro et anti-Biram, ralentissant ainsi son élan .A sa sortie de prison et en s'attaquant constamment à certains dirigeants de l'opposition tout en ménageant le pouvoir,on se demande si Biram n'a pas fait un deal avec le general AZIZ,champion des coups bas,et des pratiques dolosives.N'a-t-on pas fait disparaitre l'ANAIR au profit d'une autre structure visant à « aider les haratines »? Considerant  que le général AZIZ,n'est point généreux, ne « tendant la main qu'une fois endormi » (allusion faite aux pingres chez les maures) l'on se demande les dessous de cet altruisme spontanément sorti du chapeau du gnome de Louga. Biram va-t-il jouer les thuriféraires à son insu ? Bien que n'approuvant pas les discours prolixes et haineux du president de l'IRA,mais séduit par la persévérance de l'homme à vouloir « simplifier le réel tout en compliquant notre raison »,je mets en garde Biram Ould Abeid contre toute approximation d'avec le pouvoir central de Nouakchott dont il n'en récoltera justement  que des ....séquelles. Aziz sait ce qu'il veut car l'élection présidentielle qui s'approche accouchera  sans doute    de beaucoup de coups fourrés,d'illusions et de subterfuges.N'a-t-il pas amadoué Messaoud Ould Belkheir,le président de l'Assemblée pour mieux l'utiliser?Ceux qui croient que l'initiative de Messaoud n'a pas la bénédiction d'AZIZ,se trompent .Dans ce marché de gagnant-gagnant, Aziz compte sur le passé charismatique de Messaoud pour une décrispation de la scène politique, en vue de  berner une seconde fois l'opposition radicale  comme cela s'est passé après les accords de Dakar. Messaoud,n'ayant plus la cote auprès de l'ensemble haratin, doublé par l'IRA et surtout le nouveau parti progressiste Moustaqbel de Samoury Ould Beye et Mohamed Ould Berbosse,qui réfutent  le service de « l'oncle Tom »,veut séduire les maures voire au-delà.En s'investissant corps et ame dans une réconciliation nationale qui n'a aucune chance d'aboutir tant que le césarisme ,comme  l'harmattan soufflant  sur le ventre vide des mauritaniens toutes tendances confondues ,tiendrait  le haut du pavé,le president de l'Assemblée Nationale joue gros . Messaoud en décrétant d'autre part la fin de la mission du mouvement « EL Hor » pour des raisons peu convaincantes,corrompt de facto le  paradigme de bienfaisance auquel aspirait et aspire encore les descendants d’esclaves,rabougris par une privation et une spoliation séculaires de leurs droits.. « El Hor » n'a fait que poser les jalons en vue de baliser le chemin qui mène à la délivrance. Certains haratines essayeront d'emprunter des bretelles,certes juteuses mais pro domo et n'ayant aucune incidence salvatrice sur le quotidien précaire de la majorité silencieuse.Ceux qui,au contraire se seront armés de patience en évitant le piège de la mélodie Circéenne,bravant au passage les nombreuses promesses aiguisant les appétits,les brimades,les dols des pouvoirs publics,accéderont sans doute un jour au royaume de l'égalité des chances,de la justice et du bien-être. Les Haratines,en dehors des gens de bonne volonté ,ne doivent compter que sur eux-memes. C’est à dire ceux d'entre eux qui revendiquent la condition d’être hartani ,fier de l’être,comme jadis les chantres de la négritude tels Aimé Cesaire, Senghor, Leon G Damas,au moment où « il ne faisait pas bon d’être un nègre ».Il arrive que certaines personnes d'origine esclave,une fois au sommet d'une relative gloire ,tronquent leur condition sociale au profit d'un statut dit « supérieur ».Nous constatons ici que l'émancipation financière bouscule la stratification millénaire de la société bouleversant ainsi l'ordre de la nature .Ce qui pousse certains à vouloir garder leurs privilèges tout en empêchant d'autres à aspirer au bien-être socio-économique.Les Maures ne doivent pas ignorer que l'émancipation des Haratines qui se fait dans la douceur est dans l’intérêt de tout le peuple mauritanien.

  Dans le cas spécifique de notre pays,les Haratines de par leur démographie galopante,la main-d’œuvre entreprenante,la disponibilité,l'allant patriotique,constituent la proue de ce qu'on adviendra d'appeler un jour la Mauritanie nouvelle.Il faudra juste attendre la disqualification du dernier et septième chef d’État militaire ,à l'instar du serpent de Koumbi Saleh(à sept tètes coupées l'une après l'autre)pour que la légende se mue en réalité.Car la dictature est incompatible d'avec le progrès .


  Ely Ould Krombelé ,Orléans,France

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